Aujourd’hui est une journée qui se déroule en partie sur la route. En direction de Paris, dans le covoiturage, je rencontre deux étudiant·es et une personne travaillant dans le milieu de la santé. J’ai toujours aimé le covoiturage pour les discussions et les rencontres qu’on peut y faire. Après s’être chacun présenté, nous parlons de la situation professionnelle de la conductrice, qui évolue dans le milieu de la santé. Les étudiant·es, au premier tiers de la vingtaine, parlent de leur situation, et de la difficulté pour lui d’être dans deux villes en même temps pour ses études et son stage, non-rémunéré à temps plein. Il se dit heureux d’être en capacité financière de le faire, mais il ne cache pas une certaine difficulté. Je suis surpris d’apprendre que son stage en éducation spécialisée, qui est long de plusieurs semaines, est à temps plein et non-rémunéré. Ses parents lui donnent un coup de main, sans cela il ne serait pas capable de le faire.
Je leur explique ensuite ce que je fais, et la conversation se dirige vers les élections prochaines. Les trois vont aller voter, et une des phrases qui me revient est qu’il s’agit d’un acte de citoyenneté, voire d’un acte féministe pour la conductrice, et qu’il est important de maintenir ce droit. L’autre étudiante se trouve dans une école privée en région parisienne pour être aussi dans la santé.
Un autre commentaire qui revient dans la conversation concernant la présidentielle porte sur sa dimension réactionnaire. Pour Mélissa, les candidats semblent en réactions aux autres, sans proposer de véritable projet. Mes trois compères de voyage ne semblent encore pas trop sûrs de savoir pour qui voter, car la couverture médiatique de la campagne les dépasse un peu.
Par curiosité je leur demande comment il et elles s’informent. Julie, qui conduit, utilise principalement la radio et les réseaux sociaux numériques pour s’informer, et la télévision pour se divertir. Elle aime particulièrement les rubriques traitant d’histoire sur Europe 1. Pour Thibault, les informations sont glanées devant le journal télévisé (JT) de France 2 et de M6, ainsi que sur Twitter au travers des fils de Mediapart et Le Monde. Twitter est aussi utilisé pour le divertissement. Mélissa s’informe quant à elle grâce à l’application du journal Le Monde, le JT de TF1 et M6 (19h45) et elle apprécie particulièrement le Quotidien, émission sur TF1 il me semble.
En choix de série télé, la sélection est la suivante : Squid Games, les Chroniques de Bridgerton (VOST), Formula 1 (sur Netflix), Vikings, Sex Education, The Crown, The Last Kingdom, et une série sur la NBA au travers de la carrière de Michael Jordan.
La conversation se termine aussi vite qu’elle a commencé, à l’entrée d’une bouche de métro, en se quittant aussi vite que l’on s’est rencontré, comme si les trois heures passées ensemble étaient oubliées. Je ne dis pas cela avec une pointe d’amertume ou de reproche, bien sûr que non. Je le constate, c’est tout, car au final je fais la même chose. Ça me renvoie aux heures de cours passées à discuter et échanger vivement dans des salles illuminées, qui dès l’heure de la fin sonnée se voient vidées à vitesse grand V. On retourne toutes et tous dans nos bulles respectives.
Je m’assois dans le métro, et je suis très vite rejoins par beaucoup de gens à la porte de Saint-Cloud. Un jeune couple hispanophone s’installe face à moi, et dans le siège d’à côté un quinquagénaire en veste de cuir commence une série d’éternuements rythmiques en enlevant son masque à chaque fois. Nos regards se croisent et nous sourions à chaque éternuement, dans une symphonie joyeuse.
Je termine ma journée à m’imaginer conduire une rame de métro à Paris. Devenir taupe.
- Source de l’image : Sylvain Brosset